La polémique sur Hogwarts Legacy (2023) : auteur, franchise et transphobie

Vous n’y avez pas échappé, Hogwarts Legacy est LA sortie de ce début d’année 2023. Nous avons en effet d’une part la franchise Harry Potter, qui se décline en livres, en films, en jeux vidéos et en produits dérivés pour des dizaines de milliards de dollars de revenus, et d’autre part le premier gros jeu vidéo Harry Potter à sortir sur les consoles du moment depuis 2011. Et pourtant, même si le jeu est très bien accueilli par les joueurs et la critique, une polémique a enflé sur la toile et les réseaux sociaux peu avant la sortie. Il n’en fallait pas plus pour que ce soit le sujet de ce nouvel épisode d’en bref, qui résume le jeu vidéo.

 

 

C’est quoi Harry Potter ?

 

A l’origine d’Harry Potter, il y a les romans de J. K. Rowling, écrits entre 1997 et 2007, et qui content l’histoire du héros éponyme, sorcier de son état et étudiant à l’école de Poudlard, ou Hogwarts en version anglaise, alors même que le meurtrier de ses parents, un sorcier du nom de Voldemort, rôde encore. Les romans ont un succès planétaire, et font partie des romans les plus vendus de la planète, avec 600 millions de copies écoulées en 2023. Les romans attirent d’autres types de médias, et notamment le cinéma avec Warner Bros, qui adapte les aventures du sorcier entre 2001 et 2011, avec 7 milliards de dollars de recettes en box-office. Depuis, la franchise se déploie en produits dérivés, en attractions, en pièces de théâtre et évidemment en jeux vidéos. La première adaptation date ainsi de 2001, et on retrouve jusqu’en 2011 des titres majeurs adaptés aux consoles du moment, culminant avec l’adaptation du film Les Reliques de la mort – Partie 2 et la dernière partie de Lego Harry Potter en 2011. Depuis, à part des jeux sur Kinect et téléphone portable, rien de neuf, jusqu’à Hogwarts Legacy, développé par Avalanche Software et édité par Warner Bros Games. Mais alors, quoi de polémique ?

 

La polémique J. K. Rowling

 

Depuis 2018, l’autrice J. K. Rowling aime et partage des contenus jugés transphobes, et signe à partir de 2020 une série de tweets et d’articles sur ce même sujet, provoquant l’ire de la communauté trans. La polémique ne s’est ainsi jamais arrêtée pendant ces cinq dernières années, Rowling continuant régulièrement ses tweets et articles sur le sujet, tandis que de nombreuses personnalités condamnent fermement ses propos, parmi lesquels on trouve notamment les interprètes d’Harry Potter et d’Hermione Granger des films, à savoir Daniel Radcliffe et Emma Watson. On ne va évidemment pas faire l’inventaire de ce qui est reproché et des péripéties, incluant de nouveaux articles, des menaces de mort, une non-apparition dans la rétrospective sur les 20 ans des films Harry Potter parue en 2022, et j’en passe. Ce n’est pas l’objet de cette vidéo.

 

L’impact sur la franchise

 

On a donc d’un côté une franchise massive et puissante créée en 1997 et qui a plus de vingt ans, et de l’autre l’autrice originale des romans critiquée depuis 2018. Cette disjonction finit par impacter tous les futurs projets en vue pour la franchise, que ce soit l’idée d’une série Harry Potter et même l’idée d’un nouveau jeu vidéo, comme Hogwarts Legacy. C’est à ce titre qu’outre des controverses sur le jeu entre le crunch des équipes et un supposé antisémitisme sur la représentation des gobelins, les réseaux sociaux et notamment Twitter se sont enflammés sur la question du boycott du titre pour condamner l’autrice. Il est d’ailleurs fortement probable que ces mêmes personnes condamnent désormais tout ce qu’il se passera dans l’univers d’Harry Potter.

 

Transphobie ?

 

Jusque-là, il n’y a pas de problèmes. Certaines personnes qui accusent J. K. Rowling de transphobie ne souhaitent plus avoir à faire avec la moindre œuvre en rapport avec l’univers créé en 1997. Mais si la polémique a plutôt enflé ces derniers temps, c’est aussi parce qu’une minorité de personnes accusent les joueurs d’Hogwarts Legacy d’être eux-mêmes transphobes et de financer la transphobie par le simple fait d’acheter et de jouer au jeu, et s’amusent aussi à spoiler le titre. De l’autre côté, on a aussi une minorité de personnes moquant ceux qui boycottent le titre. Cette guéguerre des réseaux sociaux a, comme tout effet Streisend, contribué en partie à une encore plus grande couverture médiatique du titre, s’il n’en avait pas déjà assez.

 

Franchise et artiste original

 

Ce débat permet tout de même de se poser quelques questions, comme par exemple sur la question de l’auteur, comme cela avait pu être posé au moment du hashtag #MeToo dans le monde du cinéma : à partir de quel moment séparer l’œuvre de l’artiste ? En l’occurrence, c’est ici encore plus complexe, car l’écrivain initial a laissé sa place à une franchise appartenant à la Warner Bros. Y a-t-il encore une trace de l’auteur original dans une telle franchise avec tant de nouveaux créateurs qui façonnent l’univers ? C’est d’autant plus difficile à traiter que le jeu vidéo met en relation de nombreuses personnes, que ce soit les différentes équipes chez le développeur, l’éditeur, les personnalités derrière l’œuvre adaptée s’il y en a une, etc. Les messages véhiculés par de telles œuvres dépassent nécessairement le cadre d’un écrivain derrière son bouquin.

 

Conclusion

 

Pour conclure sur cette affaire, malgré le boycott, il est évident qu’Hogwarts Legacy va s’imposer comme une sortie majeure de l’année 2023, en dépit des propos polémiques de l’auteur original depuis 2018. A ce titre, sans se prononcer sur le cas Rowling, il me semble que boycotter Hogwarts Legacy et par extension toute œuvre en lien avec Harry Potter car il se passe dans l’univers créé par J. K. Rowling est aussi légitime que considérer que cet univers n’a plus de lien direct avec J. K. Rowling au vu de ses vingt ans d’existence et de sa transformation en franchise multimedia. Il serait tout de même bon que chacun arrête de taper sur son voisin : boycotter une œuvre ne fait pas de vous un crétin, jouer à Hogwarts Legacy ne fait pas de vous un transphobe. C’est important à rappeler, dans un monde où tout le monde s’insulte continuellement.

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