La Fin des FARC ? (Chronique Géopolitique, Colombie)

Dans cette nouvelle série, je vais m’efforcer de donner de petits aperçus sur des conflits géopolitiques contemporains. Le sujet n’est pas simple, et les définitions ne sont pas évidentes. S’il est possible de gloser sans fin sur la définition, on peut retenir que la géopolitique consiste en une interaction à l’échelle locale, régionale voire mondiale entre d’une part un milieu géographique, un territoire, une frontière, une enclave, etc., et d’autre part la politique, qui se définit par l’exercice du pouvoir et les rivalités qui en découlent, influant sur la politique au sens large, c’est-à-dire lorsqu’elle désigne une société ou un ensemble de sociétés, avec son cadre culturel, économique, social etc.

 

Le sujet n’est donc pas simple, mais se structurera autour d’articles synthétiques réalisés à partir du recoupage d’informations et de quelques lectures. Contrairement à ma série Conflit d’Histoire, nettement plus documentée, il s’agira donc d’être concis. Pour notre première chronique, il s’agira de parler des FARC. Et comme le sujet m’a beaucoup intéressé, il n’est peut-être pas utopique de dire qu’une future série de Conflit d’Histoire traitera du sujet…

 

Définition rapide de la guérilla

 

La définition du mot guérilla est plus complexe qu’il n’y paraît. Elle désigne tout d’abord une technique de combat pratiquée par des bandes armées, dans le but de provoquer des escarmouches en évitant les chocs frontaux, pour provoquer un maximum de dégâts sur un temps très court afin de pouvoir se replier et économiser les effectifs. Les guérilleros sont du même coup ceux qui pratiquent cette guérilla.

 

 

Seulement, s’ils peuvent appartenir à l’armée régulière légalement constituée par l’Etat, ils peuvent aussi être constitués par des civils, formant des bandes de francs-tireurs agissant en-dehors de l’armée, aussi appelés partisans. Ils forment dès lors des groupes paramilitaires, agissant comme des groupes armés, avec un commandement, un entraînement, mais sans être toujours reconnu par un Etat.

 

Le FLNC (Corse)

 

On peut distinguer la guerre dissymétrique de la guerre asymétrique, bien qu’elles concernent toutes deux des pratiques de guérilla. La première est une variante de la guerre au sens régulier du terme : une armée étatique et reconnue en combattra une autre mieux équipée et plus nombreuse en utilisant des techniques de guérilla pour frapper des objectifs militaires. La seconde concerne une armée reconnue ou non, et qui tente par des frappes militaires et/ou civiles de déstabiliser un état et de lutter contre un système étatique. Cela concerne autant le terrorisme que les mouvements indépendantistes.

 

La guerre civile

 

Depuis son indépendance vis-à-vis des Espagnols au début du XIXe siècle, la Colombie est frappée par une lutte incessante entre « libéraux » et « conservateurs », entre santandéristes et bolivariens, mouvements inspirés par d’une part Francisco José de Paula Santander y Omaña, et d’autre part par Simón José Antonio de la Santísima Trinidad Bolívar y Palacios, deux héros de l’indépendance.

 

Simón Bolívar

 

Après une période de stabilité entre 1902 et 1948, une terrible guerre civile surnommée la Violencia réoppose les deux courants politiques, faisant des centaines de milliers de victimes. Après une période de dictature militaire, les deux partis s’unissent dans le gouvernement du Frente Nacional établi en 1958, ce qui n’est pas du goût des mouvements de guérillas les plus à gauche. S’appuyant sur les paysans, premières victimes des combats et du partage des terres jugé inégal, des républiques indépendantes tentent de se mettre en place au sud du pays, mais l’armée colombienne intervient. En 1964 sont fondées les Fuerzas armadas revolucionarias de Colombia (FARC).

 

La guérilla des FARC

 

Contrôlant la culture de la coca, les FARC négocient avec les cartels de drogue pour financer leur lutte armée dans les années 80, tout en multipliant les enlèvements d’officiels ou de civils. Ils sont suffisamment puissants dans les années 90 pour négocier avec le gouvernement après quelques succès, et compter près de 18 000 guérilleros, contre quelques centaines au tout début . En face, des milices d’auto-défense d’extrême-droite s’organisent officieusement, pratiquant une répression parfois aveugle, et couverts par les militaires.

 

Au début des années 2000, les négociations sont rompues, la Colombie lance un plan de réarmement et de répression des mouvements de guérilla, parfois aveugles, appelé política de seguridad democrática. Les Etats-Unis financent cette politique à partir du Plan Colombia, d’autant plus que les FARC ont été classés depuis 2001 dans la liste des organisations terroristes. Les FARC sont peu à peu repoussés, et la violence atteint son paroxysme à la fin des années 2000, à coup de mines antipersonnelles, sur fond de trafic de drogue et de scandales, comme celui des falsos positivos, des civils tués par les militaires et catégorisés comme guérilleros par les militaires du gouvernement pour montrer des résultats.

 

La paix enfin ?

 

En 2012, après des revers importants, les FARC annoncent la fin des enlèvements. Le processus de paix suit en 2013 à La Havane, les FARC s’étant inspirés durant leur longue lutte du communisme cubain. En juillet 2015, les hostilités cessent, et le 28 août 2016, un cessez-le-feu définitif est annoncé. Après 52 ans de conflit, les 7 500 FARC encore en activité, parmi lesquels on compte près de 40% de femmes, sont tenus de rendre les armes. Entre le 20 et le 26 septembre 2016, le président colombien M. Santos rencontrera le chef Timochenko, et le 2 octobre, un référendum sera tenu dans le pays pour acter cette fin de lutte. Le conflit aura fait 260 000 morts, 45 000 disparus, 6.8 millions de déplacés et aura duré 52 ans. (Visites du net : Arte, France Culture, Le Monde, un mémoire)

 

Les autres Chroniques Géopolitiques :

Leave a Reply