La Corée du nord, état non identifié (Chronique Géopolitique, Asie de l’est)

On entend régulièrement parler des « méfaits » de ce petit état situé dans la péninsule coréenne, au contact de la Chine, de la Russie, et de la Corée du sud, ainsi que de la mer du Japon à l’est, et la mer jaune à l’ouest. La communauté internationale a mis au ban cet état jugé autoritaire, dictatorial, dont aucune information non filtrée par le régime, ni même des individus, ne peuvent entrer ou sortir, et où les images sont très rares pour le public occidental. Mis au ban des organisations internationales et régulièrement condamné par elles pour préparation de l’arme atomique, on a l’impression que cet état est resté à l’âge de la Guerre Froide, préparant la guerre nucléaire et se mettant à portée de tir des Etats-Unis, comme le rappelle le dirigeant actuel, Kim Jong-Un. Comment ce petit état menaçant réussit-il à se maintenir en place malgré tout ?

 

 

La Guerre de Corée (1950-1953)

 

Après la Seconde Guerre Mondiale, les deux Grands, en l’occurrence les Etats-Unis et l’URSS, commencent à s’opposer à partir de deux visions du monde diamétralement opposées. C’est la période de la Guerre Froide, où deux blocs se forment autour des deux Grands, et où les guerres se font dans des espaces périphériques et non pas en confrontation directe. On passe sur toutes les étapes de ce conflit pour rappeler que l’OTAN, alliance militaire des Etats-Unis, est fondée en 1949, la même année de la fin de la guerre civile en Chine. La Chine est divisée depuis la chute de la dynastie Quing en 1911 entre des « seigneurs de guerre ». Après les longues luttes au sein de l’état, puis contre le Japon, deux partis émergent : le parti communiste chinois et le Kuomintang (parti nationaliste). En 1949, reprenant l’avantage, Mao Zedung, le dirigeant du PCC depuis 1935, réussit à exiler les nationalistes à Taïwan, et deux états chinois voient le jour (on en parlait ici).

 


La Guerre de Corée.

 

Aussi, la guerre de Corée va être la première émanation de cette Guerre Froide. La Corée est déjà partagée en deux, entre Soviétiques et Américains sur le 38e parallèle. Après la fin de l’occupation japonaise, les communistes du nord, appuyés par la Chine nouvellement communiste et l’Union Soviétique, attaquent en 1950 les républicains du sud, et les États-Unis réagissent immédiatement avec leurs alliés en projetant des forces pour appuyer les Coréens du sud. Cette guerre civile dure trois années, avec une poussée nord-coréenne rejetée par la débarquement des troupes américaines du général MacArthur, entraînant l’intervention de centaines de milliers de volontaires chinois. Au bout de 3 ans, et plus d’un million de morts, l’armistice est signée et organise la partition de la Corée en deux entités. La guerre n’est toujours pas terminée, mais une zone démilitarisée est mise en place entre les deux Corée.

 

La question nucléaire

 

La Corée du nord et la Corée du sud prennent des directions différentes du fait de leurs alliances respectives. La Corée du sud se retrouve ainsi dans le système-monde, tandis que la Corée du nord s’appuie plus que jamais sur son plus grand allié, la Chine. La Corée du nord s’industrialise et vise l’auto-suffisance, et commence à libéraliser son économie en 2002, par l’introduction de zones franches. Toutefois, c’est la question nucléaire qui plombe ses relations. Accusée en 2003 de tenter depuis 1989 d’acquérir l’arme atomique, elle procède à ses premiers essais en 2006, s’occasionnant l’ire de la communauté internationale. Malgré des négociations et des promesses, le programme nucléaire reprend dès 2008.

 

 

En 2009, après un autre essai nucléaire, le conseil de sécurité des Nations Unies impose des sanctions économiques et commerciales via la résolution 1874. Toutefois, le programme nucléaire continue, et l’allié reste la République populaire de Chine. Certaines sources indiquent même que la Corée du nord est moins isolée diplomatiquement qu’on ne le pense (avec notamment des tractations commerciales militaires avec l’Iran par l’intermédiaire de la Chine révélées en 2010 par Wikileaks). Les tensions continuent, parfois assorties de sanctions, de rétropédalages, et de nouvelles tensions. Le régime oscille entre bonnes intentions et essais nucléaires, réduisant sa crédibilité mais permettant de maintenir le cap. D’autant que l’état peut agir comme une zone-tampon entre la Chine et la Corée du sud, toujours appréciable tant les tensions en Mer de Chine sont intenses.

 

La crise des missiles

 

Cette course à l’armement est toujours d’actualité : le 12 février 2017, Pyongyang tire un missile balistique, tombant très proche du Japon, tir félicité officiellement par le régime et dénoncé par le Japon, la Corée du sud et les Etats-Unis. L’ambition affichée de l’actuel dirigeant est de pouvoir être à portée de tir des Etats-Unis. Le 6 mars, trois autres tirs ont lieu. Le 5 avril, un autre tombe en mer du Japon. Le 8 et 9 avril, les Etats-Unis annoncent l’envoi du porte-avions Carl Vinson et de son escadre, dans une région où manoeuvrent déjà par précaution la Corée du sud et le Japon.

 


L’escadre américaine, envoyée « par mesure de précaution ».

 

Cette nouvelle crise illustre une nouvelle fois comment la Corée du nord s’y prend pour agir en toute impunité. Après une montée en puissance, la Chine veut agir diplomatiquement, de nouvelles sanctions sont votées, et il s’agit de voir dans les prochains jours si une crise majeure peut avoir lieu, en sachant que le discours du dirigeant nord-coréen reste assez belliciste. L’intervention des Américains reste exceptionnelle dans cette zone, d’autant qu’elle fait suite au tir américain de 59 missiles sur une base aérienne syrienne, augurant un tournant de l’administration Trump.

 

Une région en crise

 

Les inimités entre les états de la zone sont légions, et la Corée du nord concentre les tensions. La Chine, malgré les rappels à l’ordre du régime, le soutient et est prête à jouer le rôle d’intermédiaire, empêchant l’isolement diplomatique du régime. Les sanctions internationales isolent la Corée du nord économiquement et commercialement, mais les zones franches et la Chine agissent comme des passerelles pour ce petit état. Malgré les sanctions internationales et le danger de cet état dont on ne sait au final que peu de choses, la Corée du nord se maintient. L’escadre américaine et les tirs de missiles balistiques rendent la situation encore plus tendue, et il s’agit de voir si cette crise de 2017 pourra être résolue diplomatiquement.

 

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