Black Panther, le Marvel décapant et renversant

Bon, j’ai vu le meilleur film Marvel sorti depuis le début du Marvel Cinematic Universe. Il s’appelle Black Panther, et tire complètement son épingle du jeu pour nous proposer un divertissement de très grande qualité ainsi qu’un subtil renversement du film hollywoodien traditionnel grâce à son ambiance, à son casting, et à son scénario. Black Panther est un des premiers super-héros noirs, apparu à la fin des années 60, notamment dans les Quatre Fantastiques. Le héros est le roi du Wakanda, un pays d’Afrique qui cache sa technologie ultra-sophistiquée depuis des millénaires, se faisant passer pour un petit pays de fermiers aux yeux du monde, et n’autorisant personne à rentrer dans leur Eden et leur sanctuaire. Le Black Panther reçoit grâce à une plante mystérieuse la bénédiction d’une entité d’un autre espace que terrestre, le rendant surhumain. Combinant haute-technologie, agilité, et surpuissance, le roi doit résoudre régulièrement des crises et pourchasser les super-vilains, ça ne vous surprendra pas. Passons au film.

 


Première apparition de Black Panther (juillet 1966).

 

I. Synthèse culturelle audacieuse

 

Pendant que les musiques savamment orchestrées laissent la place à de magnifiques plans illustrant la technologie du Wakanda, l’attirail étrange de ses habitants, et une poignée de paysages magnifiques, on retrouve Black Panther, qu’on avait laissé dans Civil War et qui essayait de venger la mort de son père à la suite d’un attentat terroriste aux Nations-Unies, prêt à être couronné roi, dans un pays qui se camoufle du monde extérieur pour préserver son mode de vie et ses traditions, et ne pas se retrouver embarqué dans le monde extérieur, un monde qui les prend largement de haut en les prenant pour un petit pays d’Afrique pauvre et sauvage. Le renversement est subtil et intéressant. Ce n’est pas le seul, car c’est un des films qui assume le plus son identité en proposant une galerie de personnages crédibles et forts, dont une bonne majorité de femmes, et qui plus dans un fillm hollywoodien majoritairement noirs. Mais ce n’est pas tout, le film s’attache à nous plonger dans un melting-pot culturel, empruntant costumes, armes et pratiques rituelles à un certain nombre de pays d’Afrique pour en faire une synthèse audacieuse, qui nous fait un peu peur au début, mais qui réussit à trouver sa cohérence dans les trente premières minutes. C’est très rafraichissant.

 


Le « méchant » américain souhaitant ouvrir le Wakanda.

 

Le roi aura de quoi faire pour conserver l’identité et l’anonymat de son pays, tout en se battant face aux problèmes internes dus à l’arrivée d’un étranger noir venu tout droit des Etats-Unis qui veut tout simplement…ouvrir le pays aux autres, et à la souffrance d’autrui. Des questions sur l’identité noire et même la migration sont posées, face à un Wakanda exclusif, et qui renverse la question contemporaine des réfugiés, là-encore assez subtilement. Marvel nous fait du bien en essayant de nous faire sortir des sentiers battus, de bousculer notre conformisme, et de créer une alternative aux sociétés occidentales si souvent campées dans le milieu du cinéma, mêlant pratiques ritualisées et très haute technologie. Celui qui sait a le pouvoir, on le sait depuis Foucault, mais cette fois-ci, la technologie est du côté des Wakandais : et si, pour une fois, on renversait cette différence pour marquer ce qui ne va pas dans cette posture occidentaliste ?

 


Synthèse et renversement.

 

II. Un bon divertissement

 

Le résultat est ainsi intéressant. Bien sûr, ce ne serait pas un Marvel si l’histoire ne se laissait pas suivre très vite, avec des retournements de situations, et des combats très bien chorégraphiés, même si on a souvent l’impression que la Panthère Noire pratique à haut niveau le judo plutôt que l’art délicat des griffures félines. Le tout dans des environnements magnifiques et avec des musiques qui ne nous laissent jamais tomber. Mention spéciale aux percussions donnant un petit côté « tribal » là encore pas si usité, et qu’on retrouvait en partie dans un Mad Max : Fury Road survolté.

 


Félin et haute technologie.

 

Il est vrai aussi que, malgré tout, le film ne nous montre pas des héros avec des conflits intérieurs, mais des représentants du bien, des gens qui se posent les bonnes questions. Le différend entre le roi et l’étranger trouve sa conclusion à la fin du film, comme on pouvait s’y attendre, sans brutales remises en question. Le côté un peu manichéen du « bon roi » est indiqué dès le début du film, loin justement du MCU qui essaye de briser les codes avec des héros pleins de fêlures, mais c’est aussi justement un bon moyen de changer d’air, de pays, d’ambiance et de système d’honneur, histoire de renverser nos attentes et de nous surprendre un peu dans la dose habituelle et annuelle de Marvel. Black Panther nous prend ainsi au collet afin de nous montrer des choses qu’on n’attendait pas forcément d’un Marvel.

 

 

Conclusion

 

Les films Marvel ne sont pas forcément réputés pour leur qualité dans le déroulement de l’action et du scénario, mais Black Panther s’assure directement une place de choix, se plaçant dans mon propre top avec Doctor Strange et la série des Gardiens de la Galaxie, qui font davantage leur beurre sur l’ironie et le second degré qu’un Black Panther plutôt sérieux sur les bords. On essaye, sans trop y croire, de leur faire confiance pour ne pas faire s’écrouler nos attentes avec leur grand mash-up grand public s’annoncant pour bientôt, Infinity War, car ce n’est généralement pas dans le multivers que les scénaristes du MCU éprouvent leurs compétences correctement.

 

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